lundi 16 septembre 2024

85 - Je suis un incapable

Moi, je suis un incapable.
 
Je ne sais rien faire d'utile de mes dix doigts. Je suis infoutu de subvenir par moi-même à mes charges alimentaires. Je ressemble à un oisillon quémandeur au bec ouvert. Je prends le bon grain qu'on me verse dans le gosier et ne donne rien en retour.
 
Si ce n'est mon insatiable piaillement d'improductif affamé d'assistance vitale et de soins divers.
 
La pire chose que la société pourrait m'offrir, c'est un travail. Ce qui pour mes concitoyens est considéré comme le bien le plus précieux au monde, serait pour moi un fardeau.
 
Je ne veux pas de ce cadeau trop pesant pour mes ailes. Pour m'envoler, il me faut de l'air, non du plomb. J'ai besoin de respirer, pas de m'enchaîner à des valeurs plus lourdes que l'azur.
 
Pour manger, je déploie des trésors de renoncement aux obligations du turbin. Et aux lois de la pesanteur qui vont avec. Je ne sais pas me nourrir autrement qu'à travers les fruits du labeur d'autrui. Trimer pour vivre, ce n'est pas mon fort. Me casser le dos au boulot, ce n'est pas mon dada.
 
Moi ce que je préfère, c'est voler. Dans les nuages, je veux dire.
 
M'alléger et prendre la direction du zénith, loin de la terre. Proche de l'éther. Aux antipodes de vos pieds de balourds.
 
Travailleurs, je ne parviens pas à me mettre à votre hauteur.
 
Perché dans mes sommets, les hommes d'en bas sont des fourmis sous mon regard plongeant. Ce n'est quand même pas de ma faute si je vous vois tous petits de là où je suis...

Ma vraie mission vous échappe : je suis là pour vous montrer un autre chemin, vertical.
 
Vous me reprochez mon inactivité sociale, ma dépendance au système que je raille, le poids mort que j'incarne pour la collectivité.

Mais dès que vous êtes englués dans votre vacuité matérielle, repus de superflu, surchargés de graisse, écoeurés de richesses, étouffés par vos babioles, accablés de luxe, terrassés par votre opulence, fatigués de votre horizontalité, lassés de vos braiements, dégoûtés de vous-mêmes, honteux de votre paresse spirituelle, vous levez les yeux et me cherchez désespérément dans le ciel.

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